Le développement d’une activité économique étant le plus souvent accompagné d’un processus de création, il semble essentiel que l’investisseur puisse protéger son investissement. Ainsi, il convient de connaitre les droits pouvant être protégés et la procédure d’enregistrement de ces droits.
Comment obtenir un droit de propriété intellectuelle au Pérou ?
L’INDECOPI
L’Institut National de Protection de la Concurrence et de la Propriété Intellectuelle – Instituto Nacional de Defensa de la Competencia y de la Protección de la Propiedad Intelectual (« INDECOPI »), dont le siège se situe à Lima, est un organisme public en charge, comme son nom l’indique, de promouvoir le respect de la concurrence et de faire respecter les droits de propriété intellectuelle. C’est auprès de lui que l’on peut obtenir l’enregistrement d’un nouveau droit de propriété intellectuelle et que l’on formule les requêtes en cas de violation d’un droit de PI par un tiers.
À l’instar du droit français, le droit péruvien différencie la propriété littéraire et artistique et la propriété industrielle. Nous étudierons dans ce chapitre la protection des brevets et marques qui sont des droits de propriété industrielle et la protection des logiciels qui se fait à travers le droit d’auteur.
Table des matières
1. Définition et durée de protection
Le brevet est un titre accordé par l’État à un titulaire pour exercer le droit exclusif de commercialiser une invention pendant une période et sur un territoire définis. Au Pérou, la durée d’un brevet d’invention est de 20 ans à partir du dépôt de la demande. Le droit péruvien octroi également des brevets de modèle d’utilité protégeant les innovations permettant une utilisation nouvelle ou différentes d’invention déjà existantes. Ces brevets étant plus faciles à obtenir, ils ont une durée de validité de 10 ans.
2. Qu’est-ce qui est brevetable ?
Les brevets protègent les inventions. Le droit péruvien définit les inventions comme une idée ayant été matérialisée pour résoudre un problème technique dans tout domaine de la technologie. Ainsi une invention peut être, entre autres, un appareil, un composé chimique, un matériel, un système ou une procédure.
Ne sont pas considérées comme des inventions et ne peuvent donc PAS être brevetées :
- Les inventions dont l’exploitation commerciale, sur le territoire sur lequel la protection est demandée, doit nécessairement être évitée afin de protéger l’ordre public, la moralité, la santé ou la vie des personnes, des animaux ou pour préserver l’environnement,
- les découvertes, théories et méthodes scientifiques ou mathématiques,
- tout ou partie des êtres vivants tels qu’ils se trouvent dans la nature, le matériel et les processus biologiques,
- les œuvres protégées par le droit d’auteur,
- les méthodes thérapeutiques ou chirurgicales ainsi que les méthodes de diagnostic appliquées aux humains ou aux animaux.
- les plans, règles et méthodes pour l’exercice d’activités intellectuelles, de jeux ou d’activité économiques et commerciales,
- les programmes informatiques ou logiciels en tant que tels (car ils sont protégés par le droit d’auteur), et
- les façons de présenter l’information.
3. L’obtention d’un brevet
a. Qui peut demander un brevet ?
Lors d’une demande de brevet, on distingue trois types d’acteurs qui peuvent, ou non, être réunis en une seule et même personne : l’inventeur, le demandeur et le titulaire du brevet.
En général, toute personne physique ou morale peut demander un brevet. Le demandeur est responsable de suivre toute la procédure devant l’autorité et de présenter les informations nécessaires dans les délais. Dans le cas où le demandeur est une personne morale, elle doit agir par le biais d’un représentant. En principe, c’est la personne qui en fait la demande qui devient titulaire du brevet.
Quoi qu’il en soit, toutes les demandes de brevet doivent nécessairement mentionner l’identité d’un inventeur personne physique qui sera titulaire du droit moral rattaché au brevet.
Dans le cas où la personne demandant le brevet n’est pas l’inventeur, il est nécessaire qu’il présente un document de cession au moyen duquel l’inventeur ou les inventeurs se déclarent comme tel(s) et cèdent les droits voisins générés par la demande de brevet et par conséquent les droits pouvant être générés après sa concession.
Enfin, le titulaire du brevet est celui qui a les droits exclusifs sur l’invention protégée. Généralement c’est la personne qui en fait la demande mais il peut arriver que le brevet soit par la suite, transféré, cédé ou vendu en tant que bien.
b. Conditions d’obtention d’un brevet
Pour qu’une invention puisse être protégée par un brevet, l’INDECOPI vérifie que celle-ci satisfasse les exigences suivantes :
- Être nouvelle. À la date de soumission de la demande, il ne doit pas y avoir dans le domaine public, d’autre technologie fournissant une solution égale ou similaire à celle fournie par l’invention que l’on veut breveter. Il est important de noter que la nouveauté est un concept absolu puisqu’il est exigé qu’elle soit de nature universelle et non pas seulement en rapport avec le territoire sur lequel la protection est recherchée.
- Être inventive : L’invention ne doit pas découler de manière évidente des connaissances du domaine public.
- Avoir une application industrielle : L’invention doit pouvoir être reproduite ou utilisée dans le milieu industriel.
- Pouvoir être décrite de manière claire et complète : Lors du dépôt de la demande de brevet, celle-ci doit contenir une description claire et complète de l’invention pouvant permettre à une personne compétente de la reproduire à partir des informations fournies.
c. Contenu d’une demande de brevet
Pour demander un brevet au Pérou, il est nécessaire de soumettre une série de document devant l’INDECOPI. Ces documents sont collectivement appelés « Registro de Patente de Invención » – Enregristrement de Brevet d’Invention. Afin d’être complète, la demande d’enregistrement de brevet doit contenir :
- Le formulaire de demande contenant : l’identification du demandeur et de l’inventeur, la dénomination de l’invention et le type de brevet demandé
- Description de l’invention en anglais. La liste des séquences est présentée sur support magnétique (CD) au format TXT.
- si nécessaire :
- des figures ou des dessins techniques au format A-4 (01 exemplaire),
- certificat d’exposition,
- copie du document de cession des inventeurs avec les signatures dûment légalisées.
- l’indication du numéro d’enregistrement du contact d’accès et sa copie,
- copie du document accréditant la licence d’autorisation d’utilisation des connaissances traditionnelles,
- certificat de dépôt de matériel biologique.
- Preuve de paiement des frais de dossier : 1 269,07 PEN (environ 317 €)
Dans le cas où l’inventeur n’est pas le demandeur ou demanderait à une personne de le représenter pendant la procédure :
- Une procuration.
- La cession du droit de brevet de l’inventeur au demandeur.
d. Procédure d’une demande de brevet
Dépôt de la demande complète
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Étude de la demande par l’INDECOPI
Après dépôt de la demande complète, l’INDECOPI dispose d’un délai de 180 jours ouvrables, pour examiner sa recevabilité.
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Publication de la demande à la « Gazette Électronique de Propriété Industrielle »
Une fois la demande formulée si l’INDECOPI la considère valable, il effectuera une publication de celle-ci dans la « Gazette Électronique de Propriété Industrielle » – Gaceta Electrónica de Propriedad Industrial ». La publication permet aux tiers de manifester une éventuelle opposition dans le cas où l’enregistrement de la marque affecterait leurs droits. Les tiers peuvent manifestement leur opposition sous 30 jours ouvrables à compter de la publication.
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Octroi du brevet
Si aucune opposition n’a été formée l’INDECOPI peut octroyer le brevet. Cependant, elle n’est soumise à aucun délai pour le faire.
⚠La protection obtenue ne vaut que sur le territoire national. Si l’on souhaite obtenir une protection à l’étranger, il convient d’en demander l’enregistrement dans chacun des pays visés.
1. Définition et durée de protection
La marque est le signe utilisé pour distinguer et différencier les produits ou services sur le marché. Au Pérou, les marques sont protégées pour une durée de dix ans à partir de l’émission de la résolution d’enregistrement par l’INDECOPI.
2. Qu’est-ce qui peut être enregistré en tant que marque ?
Une marque peut être composée de mots, dessins, lettres, chiffres, emballage, emblèmes, éléments figuratifs etc. On peut également enregistrer des marques sonores : des sons ou mélodie et des marques olfactives comme un parfum.
3. L’enregistrement d’une marque
- Une marque peut être enregistrée pour le compte d’une personne physique comme pour celui d’une personne morale.
- Comme en France, l’enregistrement d’une marque de biens ou de services se fait « par classe » de produits ou services.
a. Conditions d’enregistrement d’une marque
Pour pouvoir être enregistrée en tant que telle, une marque doit :
- Être représentée graphiquement
- Être distincte d’autres marques.
⚠ Avant d’effectuer tout dépôt de demande d’enregistrement de marque, il convient d’effectuer une recherche d’antériorité. Cela n’est pas obligatoire mais permet de vérifier si la marque dont on demande la protection est susceptible d’entrer en conflit avec d’autres marques déjà existantes. Cette recherche peut être effectué par l’INDECOPI ou en ligne sur leur site internet.
b. Contenu d’une demande d’enregistrement de marque
Pour être étudiée par l’INDECOPI, la demande d’enregistrement doit contenir :
- L’identification du demandeur,
- La marque dont l’inscription est demandée et, si le signe a des éléments graphiques ou des formes en trois dimensions, leur reproduction en formats physique et numérique,
- La désignation des produits ou services pour lesquels l’enregistrement est demandé,
- La preuve du paiement des frais de dossier : 534.99 PEN (environ 133 €).
Il est possible de formuler la demande d’enregistrement en ligne sur le site de l’INDECOPI.
c. Procédure d’enregistrement d’une marque
Dépôt de la demande complète
↓
Étude de la demande par l’INDECOPI
Après dépôt de la demande complète, l’INDECOPI dispose d’un délai de 15 jours ouvrables pour examiner sa recevabilité.
↓
Publication de la demande à la « Gazette Électronique de Propriété Industrielle »
Une fois la demande formulée si l’INDECOPI la considère valable, il effectuera une publication de celle-ci dans la « Gazette Électronique de Propriété Industrielle » – Gaceta Electrónica de Propriedad Industrial ». La publication permet aux tiers de manifester une éventuelle opposition dans le cas où l’enregistrement de la marque affecterait leurs droits. Les tiers peuvent manifestement leur opposition sous 30 jours ouvrables à compter de la publication.
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Enregistrement de la marque
Si aucune opposition n’a été formée l’INDECOPI dispose d’un délai de 180 jours ouvrables à partir de la date de dépôt de la demande complète pour enregistrer la marque.
⚠La protection obtenue ne vaut que sur le territoire national. Si l’on souhaite obtenir une protection à l’étranger, il convient d’en demander l’enregistrement dans chacun des pays visés.
La demande d’enregistrement d’un droit déjà existant dans un autre pays
Le Pérou étant signataire de la Convention de Paris pour la protection de la propriété intellectuelle, le droit péruvien reconnait un droit de priorité pour les brevets et marques ayant été régulièrement déposé dans l’un des États partie.
La Convention de Paris établit que les brevets et marques délivrés dans différents pays signataires sont indépendants les uns des autres. Ainsi, l’octroi d’un brevet ou d’une marque dans un pays n’oblige en rien les autres pays à accorder une protection pour la même invention ou marque. C’est ce qu’on appelle le principe de la territorialité. Cela renforce la souveraineté des nations d’accorder ou refuser des inventions selon leurs propres règles et oblige les inventeurs à engager une procédure indépendante dans chaque État dans lequel ils veulent obtenir la protection de leur invention.
Lorsque l’enregistrement est revendiqué sur la base d’un droit existant dans un autre pays, le demandeur doit joindre la preuve d’enregistrement ou de demande d’enregistrement de sa marque ou de son brevet dans un autre État.
Les demandes de priorité doivent être formulées devant l’INDECOPI, dans un délai de :
- 6 mois pour les marques
- 12 mois pour les brevets, à partir de la date d’octroi de la protection dans l’autre État.
Le droit péruvien définit les logiciels comme étant l’expression d’un ensemble d’instructions faites de mots, de codes, plans ou de toute autre manière qui, lorsqu’elle est incorporée dans un dispositif de lecture automatique, est capable d’amener un ordinateur à exécuter une tâche ou obtenir un résultat.
1. Comment protéger un logiciel ?
Les logiciels sont reconnus et protégés par le droit d’auteur en tant qu’œuvres littéraires. La protection est automatique et survient dès que le programme a été rédigé. Ainsi, il n’est pas obligatoire d’enregistrer le programme devant l’INDECOPI pour obtenir sa protection, cependant cela est fortement recommandé dans l’ordre de disposer d’une date de création.
2. Conditions de protection des logiciels
Afin d’être protégé par le droit d’auteur en tant qu’œuvre, un logiciel doit respecter trois exigences cumulatives . Il doit :
- Pouvoir être divulgué, c’est-à-dire “lu”
- Être original, en se différenciant de tout autre programme créée précédemment
- Être susceptible d’être reproduit, c’est-à-dire qu’il peut être fixé sur un support quelconque et qu’il est possible d’en obtenir des copies.
3. Protection obtenue
Le droit d’auteur protège le code source, le code objet, la documentation technique et le manuel d’utilisation. La protection s’étend à toutes les versions successives du programme, ainsi qu’aux programmes dérivés.
Comme son nom l’indique, les droits d’auteurs appartiennent en principe à l’auteur de l’œuvre protégée. On reconnait en tant qu’auteur d’un logiciel toute personne ayant participé à sa création ou à sa programmation. La loi octroie aux auteurs de programmes informatique deux types de droits : des droits moraux et des droits patrimoniaux.
Les droits moraux sont composés du droit de paternité, qui permet à l’auteur du logiciel d’être considéré en tant que tel, et du droit de divulgation qui permet à l’auteur de rendre public ou non son programme. Ces droits sont imprescriptibles.
Les droits patrimoniaux sont les droits de reproduction, distribution, de traduction et d’interdiction d’importation du logiciel. Ces droits s’éteignent au bout de 70 ans à compter du 1er janvier de l’année suivant la première fois que le logiciel a été rendu public. Après ces 70 ans, le logiciel tombe dans le domaine public et toute personne peut librement utiliser le logiciel sans verser de rémunération.
Protection des bases de données
Le droit d’auteur protege également les bases de données. Les bases ou compilations de données ou d’autres matériels, lisibles par machine ou sous une autre forme sont protégées à condition que la sélection ou la disposition des matériaux constituent des créations intellectuelles. La protection ainsi reconnue n’est pas étendue aux données, informations ou documents compilés, mais n’affecte pas les droits qui peuvent subsister sur les œuvres ou matériels qui la composent.
Comment protéger ses droits ?
Concernant le brevet, au Pérou, contrairement à en France, il n’est pas nécessaire de payer chaque année pour conserver le droit obtenu. Une fois obtenu, la protection dure 20 ans et n’est pas renouvelable.
Pour les marques, il en est de même, une fois les frais de dossier payés lors de la demande de protection, celle-ci sera valable pour une durée de 10 ans et ce n’est qu’au terme de ces 10 ans qu’il conviendra de payer de nouveau pour conserver la protection. Le renouvellement, qui peut être demandé autant de fois que nécessaire tant que la marque est utilisée, coute 240 soles (environ 60 €).
Pendant la période de validité du brevet, le titulaire de celui-ci peut empêcher des tiers d’exploiter l’invention, de la reproduire, de la vendre ou encore de l’utiliser sans son consentement.
Le titulaire d’une marque est également le seul autorisé à utiliser sa marque et peut prévenir l’apparition sur le marché d’une marque identique ou similaire à la sienne qui pourrait causer une confusion dans l’esprit du consommateur concernant l’origine des produits.
De la même façon, le titulaire des droits patrimoniaux d’une œuvre est le seul à pouvoir copier et distribuer celle-ci.
En cas de violation de leurs droits, les titulaires de ces derniers peuvent faire une requête devant l’INDECOPI pour que celle-ci prennent les mesures nécessaires à faire cesser la pratique et éventuellement réparer les dommages causés au titulaire.
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